Stravinsky : trois mouvements de Petrouchka transcrits pour piano (Boris Giltburg)

Le pianiste Boris Giltburg interprète trois mouvements de Petrouchka, d'Igor Stravinsky, transcrits par le compositeur en 1921 pour le pianiste Arthur Rubinstein. Extrait du concert enregistré samedi 4 novembre 2017 à l'Auditorium de la Maison de la Radio (Paris). Programme : 1. Danse Russe 2. Chez Petrouchka 3. La Semaine grasse Note de programme : Petrouchka fut initialement conçu comme une pièce de concert pour piano et orchestre, sorte de divertissement dans l’attente de la symphonie païenne du Sacre. Une œuvre laboratoire dont les dissonances et superpositions bitonales allaient heurter l’auditeur, mais qui devaient pour l’heure être chaleureusement accueillies. Le compositeur avait eu « la vision d’un pantin subitement déchaîné qui, par ses cascades d’arpèges diaboliques, exaspérait la patience de l’orchestre, lequel, à son tour, lui répliquait par des cascades menaçantes. Il s’ensuivait une terrible bagarre qui, arrivée à son paroxysme, se terminait par l’affaissement douloureux et plaintif du pauvre pantin. » Parce qu’il venait de transformer les Ballets russes en compagnie permanente, Diaghilev attendait impatiemment une nouvelle partition de Stravinsky, et plus précisément le Sacre. Mais il se rabattit sur cet étrange concerto, enrichi d’un argument pour se faire premier mouvement du nouveau ballet. Créé au Théâtre du Châtelet le 13 juin 1911 sous la direction de Pierre Monteux, ce fut encore un succès. Décors d’Alexandre Benois et chorégraphie de Fokine ; sur scène, Nijinski, Karsavina et Orlov. Les couleurs slaves étaient toujours vives grâce aux mélodies puisées dans le répertoire populaire. Dans le quatrième tableau (le troisième des Mouvements pour piano seul), « c’est d’abord, le brouhaha de la foule en liesse, le tintamarre de la fête foraine brusquement interrompue par une série de divertissements. Parmi ceux-ci vous retrouverez, tour à tour, la ronde des nourrices, l’entrée des tziganes enjôlant le marchand fêtard, les cochers entraînant les nourrices dans leurs danses massives ; finalement, les déguisés et les masques avec l’apparition desquels l’allégresse générale atteint son apogée. » Si une version pour piano à quatre mains de Petrouchka fut réalisée pour les répétitions du ballet, une autre, à deux mains, ne rassembla que quelques extraits du spectacle. Dédiée à Arthur Rubinstein et créée au Théâtre des Champs-Élysées par Jean Wiener, elle avait pour intention d’offrir aux virtuoses une pièce qui les mettrait en valeur. Stravinsky raconte : « Étant pianiste moi-même, je m’intéressais surtout à l’écriture spéciale que demande une œuvre conçue à l’origine pour le piano, ainsi qu’aux multiples richesses sonores que nous offre la nature polyphonique de cet instrument. Petrouchka se prêtait d’autant mieux à une pareille transcription que, dans mon idée initiale, ce morceau avait été conçu comme une pièce de piano avec orchestre, et que dans la partition même de l’œuvre, le piano joue un rôle important. Si j’emploie ici le terme courant transcription, je tiens toutefois à prévenir un malentendu. Qu’on ne pense surtout pas que j’aie voulu donner avec le piano un ersatz de l’orchestre et rendre, dans la mesure du possible, la sonorité de ce dernier. Au contraire, je me suis efforcé de faire de ce Petrouchka une pièce essentiellement pianistique en utilisant les ressources propres à cet instrument et sans lui assigner en aucune façon un rôle d’imitateur. »

  10/04/2018 00h00  6 ans